
Alerte violette et confinement strict
Samedi 14 décembre, à 7 heures locales, Mayotte entre en alerte violette. L’archipel se prépare à l’impact d’un cyclone d’une extrême violence. La préfecture ordonne un confinement strict, incluant les services de secours et de sécurité. Fatima, 57 ans, mère de trois enfants, suit attentivement les consignes à la radio. Dans son quartier de Majicavo Koropa, l’un des plus défavorisés de Mayotte, elle se prépare avec des stocks de nourriture, d’eau et de bougies, redoutant que son logement, pourtant “sécurisé”, ne résiste aux éléments déchaînés.
L’inquiétude grandissante
Depuis plusieurs jours, la tension monte. Mayotte est placée en pré-alerte cyclonique dès mercredi, puis en alerte orange vendredi matin. Le préfet François-Xavier Bieuville annonce un événement « inédit » et prévient que près du tiers de la population, vivant dans des habitations précaires, risque de tout perdre. Des centres d’hébergement sont ouverts en urgence pour accueillir ceux dont les maisons ne sont pas sûres. Les autorités ferment également les écoles et renforcent les équipes de secours, notamment en envoyant 110 sauveteurs et pompiers de La Réunion.
Une tempête apocalyptique
Le cyclone frappe dans l’après-midi, et la réalité dépasse toutes les prévisions. À Mamoudzou, un habitant décrit la tempête comme “complètement dingue”. Un arbre s’effondre sur sa terrasse, et il se réfugie dans sa baignoire avec un matelas. À M’Tsangamouji, un autre rescapé raconte comment le toit de sa maison a été arraché, et son salon submergé de débris. Les témoignages convergent : des maisons détruites, des bananiers à terre, des tôles arrachées, des chambres aspirées par les vents. À Kawéni, le plus grand bidonville français, une rescapée témoigne : “Tout a été emporté, tout a été rasé.” La députée Estelle Youssouffa évoque des cimetières à ciel ouvert, avec des habitants peut-être engloutis sous les débris.
L’horreur à l’hôpital
La situation est également catastrophique à l’hôpital de Mayotte, où le bloc obstétrical est envahi par l’eau et les vents. Des fenêtres éclatent, et l’eau monte dans les couloirs de la maternité, l’une des plus grandes d’Europe. “C’est comme si le cyclone nous avait suivis dans les couloirs”, décrit le chef du service obstétrique. Alors qu’une femme doit accoucher, l’inondation oblige les équipes à improviser. Après plusieurs tentatives pour protéger les patientes, le médecin parvient à éviter une césarienne d’urgence, mais la situation reste critique.
Un cyclone implacable et dévastateur
Mayotte vit une journée d’horreur, et les habitants redoutent les bilans à venir. Le passage de Chido a laissé derrière lui des scènes de désolation, ravageant les infrastructures, détruisant des foyers et bouleversant les vies de milliers de personnes. Le cyclone, qui restera gravé dans les mémoires comme l’un des plus violents de l’histoire de l’archipel, a révélé la vulnérabilité de l’île face à de telles catastrophes naturelles, malgré les efforts des autorités pour sécuriser la population.
Des pertes humaines et matérielles considérables
Les premiers secours ont mis plusieurs heures à parvenir sur l’île, grâce à un pont aérien mis en place depuis La Réunion. Mais les dégâts sont immenses et les routes complètement obstruées par les débris, compliquant l’acheminement des secours et la recherche de survivants. Le ministre de l’Intérieur a reconnu la difficulté à dresser un bilan précis, soulignant que “l’habitat précaire a été entièrement détruit”, avec des quartiers entiers de bidonvilles rasés. Les infrastructures publiques, telles que l’hôpital, l’aéroport et les écoles, sont également gravement endommagées, ce qui rend la situation d’autant plus chaotique.
“Le bilan humain est très délicat à consolider”, avertissait encore le ministère de l’Intérieur, soulignant la difficulté de recenser les victimes dans une île dévastée et largement isolée.
Une estimation rendue encore plus complexe par l’isolement et la situation sociologique
L’ampleur des destructions et la lenteur des secours rendent toute estimation du nombre de victimes extrêmement incertaine. Estelle Youssouffa, députée de l’archipel, a expliqué que de nombreux villages sont désormais “coupés de toute communication”, et que dans les bidonvilles, il y a “très peu de chance qu’il y ait des survivants”.
Le facteur religieux complique encore l’estimation du bilan. En effet, 95 % des habitants de Mayotte sont de confession musulmane et, selon les traditions, l’enterrement doit avoir lieu dans les 24 heures suivant le décès. Cela pourrait rendre difficile le recensement exact des victimes et des disparus, d’autant plus que l’île abrite également plus de 100 000 habitants clandestins, ce qui complique encore la tâche des autorités.
Appel à l’urgence humanitaire et militaire
La situation est d’autant plus alarmante que Mayotte fait face à un désert médical et que les équipes de secours doivent faire face à de nombreux obstacles pour se rendre sur place. La députée Youssouffa a ainsi demandé la déclaration de l’état d’urgence pour permettre le déploiement rapide de l’armée et la sécurisation de l’île.
Au fil des heures, l’île de Mayotte voit son bilan humain se préciser dans la tragédie. Les autorités et les secours se battent contre le temps, mais la réalité de l’étendue des destructions rend l’évaluation des pertes humaines particulièrement difficile. La priorité est désormais de sauver les survivants et d’offrir un abri et des soins aux populations sinistrées.