
Les trois groupes « traditionnels », élus en 2020, réagissent à ce nouvel épisode du feuilleton, avant le conseil du 15 avril.
Il va falloir changer quelques pancartes nominatives de place et en décaler d’autres autour de la table du conseil municipal. Alors qu’ils étaient six en 2020, de trois groupes différents (deux de gauche et un d’extrême droite), ils pourraient être 12 conseillers d’opposition au prochain conseil municipal, si Jean-Paul Rivat et Jean-Marc Laval, débarqués par le maire, sont présents. Ils peuvent siéger seuls ou décider de rejoindre un groupe, le plus étoffé étant dorénavant celui de Jean-Luc Degraix, ex-adjoint à l’urbanisme, rejoint successivement par Stéphanie Calaciura, Michelle Duvernay et Jean-Luc Bouchacourt.
Considérant cette cascade de démissions comme une stratégie, Axel Dugua, le maire, a pris la décision de retirer leurs délégations à deux conseillers jugés comme non-fidèles et flirtant avec l’opposition démissionnaire. Couper l’herbe sous le pied ou couper des têtes ? Le but affiché est en tout cas clairement celui « d’assainir » le groupe. Même s’il garde une majorité absolue et confortable, avec 26 élus qui se seraient engagés à ne pas démissionner pour des raisons politiques, nul doute que les tensions vont encore monter d’un cran.
Les écologistes dénoncent une « vassalisation » des élus
À Europe Écologie Les Verts, groupe représenté par Patricia Simonin-Chaillot et Jean Minnaert, on se dit consternés par le spectacle : « Nous comprenons, vu ce contexte, que déjà quatre élus se soient clairement détachés d’un maire qui veut les enchaîner et les bâillonner. Il est grave pour la ville de Saint-Chamond de voir un maire qui interdit toute expression ou questionnement différent, et qui se pose en unique autorité. Il va jusqu’à limoger des élus alors que ces derniers n’ont pas exprimé leur désir de sortir de la majorité avec laquelle ils ont été élus. Cette vassalisation des élus est infantilisante. »
Les écologistes s’interrogent également sur l’avenir de la majorité : « Il ne restera plus aux élus de la majorité qu’à accepter sans discuter les projets que le maire veut bien mener. De quelle liberté de parole vont disposer celles et ceux qui ont signé leur engagement à rester fidèles au maire ? » Une allusion à la lettre signée par tous les élus restants (sauf un), et adressée à Axel Dugua.
« Cette procédure nous apparaît comme une démarche d’un autre temps, comme si chaque conseiller municipal, chaque conseillère municipale, devait prêter allégeance au maire. »
Saint-Chamond pour tous : « La vie municipale devient rocambolesque »
« Nous sommes sidérés par un tel spectacle, la vie municipale devient rocambolesque », abondent Christiane Marquet-Massardier et Romain Pipier, du groupe Saint-Chamond pour tous – l’écologie populaire. « Depuis 2020, nous nous étions presque habitués à subir l’indifférence, voire le mépris, d’une majorité municipale qui avançait sans jamais tenir compte des remarques, des propositions, des avis des élus de l’opposition… La pensée était binaire, les « pour » les « contre », on compte et on passe au dossier suivant », constatent-ils.
« Nous avons très souvent souligné l’absence de démocratie dans la manière de conduire la gestion et l’organisation de la ville, nous constatons aujourd’hui les dégâts provoqués par cette manière très hiérarchisée et très verticale de gérer la collectivité. Les démissions, les mises au placard se succèdent… Les joutes verbales acerbes, violentes, malveillantes, occupent l’espace public que ce soit sur les réseaux sociaux, dans la presse, pendant les conseils municipaux ou les évènements publics… Le dépeçage de la démocratie, déjà bien entamé par des politiques de droite, libérales, au service du « toujours plus », s’accélère en éloignant de plus en plus les citoyens des institutions républicaines. »
L’extrême droite demande un conseil municipal extraordinaire
À l’extrême droite, pour le groupe Saint-Chamond D’abord, Isabelle Surply indique avoir adressé directement un mail au maire de Saint-Chamond, s’inquiétant de ce que deviennent les délégations retirées : « Nous demandons la tenue d’un conseil municipal extraordinaire, car la crise qui secoue l’exécutif municipal de Saint-Chamond est sans précédent. »
Elle déplore qu’aucune communication officielle sur la réattribution des délégations supprimées n’ait été faite. « Les élus d’opposition qui composent l’assemblée municipale ont de nombreuses questions et souhaitent aborder certains sujets cruciaux qui découlent de vos décisions, votre courte intervention publiée sur vos réseaux sociaux ne suffit pas non plus à répondre à nos interrogations. Si vous refusez le dialogue, le prochain conseil risquerait à nouveau d’être le théâtre de règlements de comptes entre les différents protagonistes de cette crise, et les habitants méritent bien mieux que cela. »
Par ailleurs, elle se dit « consternée » par le fait que le maire Axel Dugua a donné une interview, « malsaine et incompréhensible » publiée sur un groupe Facebook, alors qu’il y a « une hémorragie dans sa majorité ». Elle y déplore aussi le ton et le fond du propos : « Il est peut-être fier, mais c’est irresponsable ! C’est le premier magistrat de la ville et il nous parle de ses chemises sales ! »
Vers un conseil municipal sous tension
À un peu moins d’un mois du prochain conseil, le 15 avril, l’échauffement a déjà démarré, même si on ne sait pas encore si les deux conseillers débarqués, Jean-Paul Rivat et Jean-Marc Laval, rejoindront un groupe d’opposition ou choisiront de siéger seuls. Ce sera en tout cas un bon test pour Axel Dugua. « Il vaut mieux être moins nombreux, mais bien entourés, » a estimé le maire, qui aurait été inspiré par Yves Nicolin. Le maire LR de Roanne avait, lui aussi, débarqué quelques « conseillers frondeurs » en octobre 2024.