
La raréfaction du foncier constructible n’est plus une hypothèse mais une certitude qui s’impose désormais aux collectivités territoriales. À Saint-Étienne Métropole, les élus préparent activement le futur Plan Local d’Urbanisme Intercommunal (PLUI) qui limitera drastiquement les possibilités d’extension urbaine. Une véritable révolution pour ce territoire de 53 communes qui doit repenser entièrement son développement.
Seulement 264 hectares disponibles pour les 15 prochaines années
Le chiffre est frappant : la métropole stéphanoise ne disposera que de 264 hectares de foncier à aménager pour l’ensemble de ses projets sur les quinze prochaines années. Une superficie très contrainte qui illustre l’impact concret de la loi Climat et Résilience adoptée en 2021, qui impose de réduire de 50% la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers d’ici 2031 par rapport à la décennie précédente.
« C’est un tournant majeur dans notre façon de concevoir l’aménagement du territoire, » confirme un expert immobilier local. « À titre de comparaison, la métropole a consommé environ 520 hectares sur la période 2011-2021. La réduction est donc significative et va nécessairement créer des tensions sur le marché foncier. »
Priorité au développement économique
Face à cette pénurie programmée, Saint-Étienne Métropole a choisi de privilégier le développement économique dans l’attribution des précieuses parcelles encore constructibles. Cette orientation se traduit dans le Plan d’Aménagement et de Développement Durable (PADD), document stratégique qui sera présenté au conseil métropolitain au printemps 2025. Le premier axe, intitulé « Un territoire au travail », vise à maintenir et développer l’activité économique, tout en préservant l’agriculture locale.
Cette priorisation n’est pas sans conséquence pour le marché résidentiel. « Des arbitrages seront nécessaires, et certains terrains jusqu’alors destinés à l’habitat pourraient être reclassés, » analyse un observateur du marché immobilier local.
Vers de nouveaux modèles d’habitat
Concrètement, le futur PLUI privilégiera la densification urbaine, la rénovation du bâti existant et la reconversion des friches industrielles, nombreuses sur ce territoire historiquement industriel. Cette approche s’inscrit dans le deuxième axe du PADD, Croître autrement, qui vise notamment à limiter l’artificialisation des sols.
Le troisième volet, Mieux habiter ensemble, met l’accent sur la qualité des logements, qu’ils soient neufs ou rénovés, ainsi que sur l’intégration de la nature en ville et la préservation des ressources hydriques.
Une mise en œuvre progressive
Le calendrier d’élaboration de ce document stratégique s’étale encore sur plusieurs années. Après la présentation du PADD au printemps 2025, le PLUI devrait entrer en vigueur d’ici 2027 ou 2028.
D’ici là, une phase de concertation est engagée. Les habitants sont d’ailleurs invités à une réunion publique le lundi 3 mars 2025 à 18h au Musée d’art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole pour s’informer et partager leurs interrogations sur ce document qui va redessiner leur cadre de vie pour les prochaines décennies.
Un enjeu qui dépasse Saint-Étienne
Cette problématique n’est pas propre à la métropole stéphanoise. Toutes les collectivités françaises sont confrontées au même défi depuis l’adoption de la loi Climat et Résilience, qui vise l’objectif « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN) à l’horizon 2050.
Selon le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), la France a artificialisé environ 20 000 hectares par an entre 2011 et 2021, principalement pour l’habitat individuel (68%). La réduction drastique de cette consommation foncière représente donc un bouleversement considérable des pratiques d’aménagement et un défi majeur pour les territoires.
« La rareté foncière va mécaniquement entraîner une hausse des prix des terrains, et probablement accélérer la transition vers des formes d’habitat plus compactes », prédit un urbaniste. « C’est une véritable révolution silencieuse qui s’engage dans nos villes et nos villages. »
© Photo FRED DELANGLE.