
Entre alcool et rancœur, retour sur un acte aussi coûteux qu’inexpliqué. Au petit matin du 23 mars, les caméras de surveillance de la manufacture Pralus ont capturé des images surprenantes : un jeune homme arrivant en trottinette, pénétrant dans les vestiaires et mettant délibérément le feu aux blouses de travail. Douze jours plus tard, le responsable de cet incendie comparaissait devant le tribunal en procédure de comparution immédiate.
Face aux juges, ce Roannais de 19 ans, ancien apprenti de l’entreprise, a d’abord nié les faits malgré l’accumulation de preuves accablantes. « Je reconnais mes vêtements, mais je ne me reconnais pas », a-t-il répété, semblant lui-même dépassé par son geste.
Le briquet de la discorde
L’enquête a avancé à une vitesse fulgurante, aidée par des éléments matériels irréfutables. La trottinette utilisée lors des faits, les vêtements identifiés sur les vidéos, et surtout un briquet oublié sur place portant l’ADN du suspect ont rapidement conduit les enquêteurs jusqu’à son domicile. De plus, la géolocalisation de son téléphone le plaçait aux abords de l’entreprise au moment précis de l’incendie.
Confronté à ces preuves et aux images de vidéosurveillance diffusées en pleine audience, le jeune homme a finalement concédé du bout des lèvres : « Je reconnais les faits, à moitié ».
Un litre de vodka et des ressentiments
Pour expliquer son geste, le prévenu a évoqué une consommation massive d’alcool – « au moins un litre de vodka » selon ses dires – ainsi qu’un « harcèlement » qu’il aurait subi de la part d’un supérieur durant son passage dans l’entreprise. Une explication jugée peu convaincante par Me Pierre-Yves Lucchiari, avocat de la partie civile, qui a déploré « qu’un jeune garçon n’ait pas le courage de reconnaître sa responsabilité ».
Un demi-million d’euros parti en fumée
Les conséquences financières de cet acte sont considérables pour la maison Pralus. Le préjudice est temporairement estimé à 500 000 euros, un montant qui ne comprend ni les pertes liées à l’arrêt de production, ni la valeur des matières premières jetées. L’entreprise a demandé un renvoi sur intérêts civils afin de déterminer avec précision l’étendue des dégâts.
Bracelet électronique et retour à l’école
Malgré la gravité des faits, le tribunal a tenu compte de la jeunesse du prévenu et de son absence d’antécédents judiciaires. Après plus d’une heure de délibération, il a été condamné à 24 mois de prison dont 16 avec sursis probatoire de 3 ans. La partie ferme sera aménagée en détention à domicile sous bracelet électronique, lui permettant ainsi de « retourner à l’école » comme l’a précisé le tribunal.
Cette décision équilibrée vise à sanctionner un acte grave tout en préservant l’avenir d’un « très jeune majeur » qui, selon son avocate Me Laure Picard, « s’est battu face à ses difficultés scolaires pendant 15 ans » et a été « complètement dépassé par son geste ».