
FREJUS, FRANCE - 2023/05/03: The mayor of Pau François Bayrou is seen during the funeral of François Léotard. French politician and former Minister of Defense and Culture François Léotard died on April 25 at the age of 81. His funeral takes place in Frejus. (Photo by Laurent Coust/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)
Des attentes dépassées par la réalité ?
Dans son intervention, François Bayrou a précisé que cette initiative serait financée en mobilisant le foncier disponible de l’État, en vue de construire ces logements à destination des étudiants. Toutefois, cette annonce a du mal à convaincre les principaux syndicats étudiants, qui jugent le plan insuffisant face aux besoins réels.
Hania Hamidi, secrétaire générale de l’Unef, principal syndicat étudiant, a exprimé de vives critiques. « C’est beaucoup trop peu, il en faudrait au moins 150 000 pour répondre à la demande », a-t-elle déclaré. Selon elle, le budget logement reste la principale préoccupation des étudiants, et elle s’interroge sur la sincérité de cette annonce. « Depuis 2017, le président Macron n’a quasiment rien tenu de ses engagements envers le monde étudiant », ajoute-t-elle, suggérant qu’il pourrait s’agir là d’un effet d’annonce de plus, sans réelle mise en œuvre concrète.
Des questions sur le financement et la gestion
L’Unef s’interroge également sur les modalités de financement et la gestion de ces logements. En effet, le syndicat pointe le fait que ces constructions ne seraient pas assurées par les Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), qui sont habituellement chargés de la gestion des logements étudiants et de l’accompagnement des jeunes, notamment en matière de services sociaux et de restauration. « Ce ne seront pas les Crous qui seront à l’initiative de ces constructions, or ce sont eux qui assurent des loyers décents et un accompagnement essentiel pour les étudiants », souligne Hania Hamidi.
De plus, la localisation des nouveaux logements est un point de vigilance. L’Unef redoute que ces constructions ne soient pas suffisamment proches des universités, ce qui obligerait les étudiants à de longs trajets en transport, un problème récurrent dans les grandes villes. « Si les étudiants doivent passer des heures dans les transports, ça n’a pas d’intérêt », insiste la responsable syndicale.
Des espoirs tempérés à la Fage
De son côté, la Fédération des associations générales étudiantes (Fage) affiche un scepticisme plus mesuré, tout en restant prudente. Elisa Mangeolle, vice-présidente de la Fage, rappelle que l’annonce de François Bayrou vient après celle d’Emmanuel Macron en 2017, qui prévoyait la construction de 60 000 logements étudiants. Or, très peu de ces logements ont vu le jour, ce qui rend l’annonce actuelle plus difficile à prendre au sérieux, selon elle. « Aujourd’hui, il y a un logement Crous pour 17 étudiants. Cette annonce semble positive, mais il reste à voir si elle sera suivie d’effet », explique-t-elle.
La Fage soulève également la question de la pertinence des constructions dans certaines zones. « Pourquoi ne pas plutôt réhabiliter des biens d’État, souvent situés dans les grandes villes, pour les transformer en logements étudiants ? », propose Elisa Mangeolle. Pour elle, il manque encore des précisions essentielles sur le projet, notamment en ce qui concerne la localisation des constructions et la nature du financement.
Des experts plus optimistes mais prudents
Du côté de la Fondation Abbé Pierre (FAP), on semble plus optimiste, même si la prudence demeure. Manuel Domergue, directeur des études à la FAP, salue l’objectif rehaussé par rapport à l’annonce précédente de 35 000 logements entre 2024 et 2027. « C’est une accélération du rythme de ces dernières années, ce qui est plutôt positif », déclare-t-il. Cependant, il prévient que tout dépendra des moyens financiers alloués à cette initiative, dont les détails restent flous pour l’heure.
Vers une mise en œuvre difficile mais nécessaire
Au-delà des divergences d’opinion, cette annonce met en lumière les difficultés chroniques de l’accès au logement pour les étudiants en France. Le manque de logements étudiants est un problème récurrent qui concerne particulièrement les grandes agglomérations où les loyers sont souvent trop élevés pour les budgets étudiants. Si l’annonce de François Bayrou marque un engagement clair en faveur de la construction de logements, l’enjeu reste de savoir si les promesses se concrétiseront réellement sur le terrain. Avec des syndicats et des associations qui expriment un scepticisme légitime, il est encore trop tôt pour juger de l’efficacité de cette mesure, qui devra faire face à de nombreux défis.
Avec AFP.