Il y a deux ans, nous étions tous fascinés par Dahmer, cette mini-série à succès qui confirmait le talent indéniable de Ryan Murphy, l’un des maîtres de la télévision moderne, capable de transformer tout ce qu’il touche en or. Face au succès retentissant de Dahmer, Netflix a décidé de capitaliser en lançant une série anthologique sur les crimes marquants de l’histoire américaine. La nouvelle mini-série, Monstres : L’histoire de Lyle et Erik Menendez, qui retrace l’assassinat d’un couple aisé de Beverly Hills par leurs fils, Lyle et Erik, ne suscitait pas beaucoup d’attentes, notamment parce que cette affaire des années 90 est moins connue en Europe. Aux États-Unis, cependant, ce crime avait fait la une avant d’être éclipsé par le procès d’O.J. Simpson (lui aussi traité en série par Murphy).
Contre toute attente, Ryan Murphy frappe une nouvelle fois fort, en s’éloignant des clichés pour offrir une vision nuancée de cette affaire complexe. Sa stratégie ? Alterner les deux versions de l’histoire avec une conviction égale, laissant le spectateur, comme le jury de l’époque, face à un dilemme. Doit-on croire les fils, qui prétendent avoir tué leurs parents en légitime défense après des années d’abus ? Ou adhérer à la version de l’accusation, qui parle d’un double meurtre commis par deux psychopathes avides de s’emparer de l’héritage familial ?
Ce qui rend cette série si captivante, c’est que des preuves existent pour appuyer l’un ou l’autre des scénarios, et des témoins de la famille Menendez confirment ces deux hypothèses contradictoires. Les débats ne manqueront pas d’animer les téléspectateurs, chacun prenant parti pour l’une des versions.
Une critique des mécanismes de persuasion
Ce qui distingue Monstres : L’histoire de Lyle et Erik Menendez, c’est son habileté à montrer comment une histoire peut être façonnée pour manipuler les émotions et les croyances. Comme lors du procès original, où les jurés avaient été émus aux larmes par les récits des horreurs perpétrées par José Menendez (joué par un Javier Bardem éblouissant), la série nous amène à sympathiser avec les accusés. Mais à l’image du second procès, où les jurés furent outrés par la froideur calculée des deux frères, le spectateur est ensuite invité à douter de cette version et à voir les fils Menendez comme de machiavéliques menteurs.
L’épisode central, The Hurt Man, est un chef-d’œuvre de mise en scène. Pendant trente-cinq minutes, on assiste à un monologue déchirant d’Erik Menendez, interprété avec brio par Nicholas Alexander Chavez. La caméra, en plan fixe, avance lentement vers le personnage, capturant l’intensité émotionnelle de cette confession ambiguë.
Nouvelles preuves et potentielle réouverture du dossier Menendez
L’impact médiatique de la série pourrait bien avoir des répercussions dans la réalité. En effet, de nouvelles preuves découvertes récemment pourraient relancer l’affaire. En 2015, une lettre écrite par Erik Menendez huit mois avant le meurtre a été retrouvée après le suicide de leur cousin, Andy. Cette lettre détaillait les abus sexuels subis par Erik de la part de son père, un élément longtemps ignoré par la justice.
Lors d’une conférence de presse à Los Angeles le 3 octobre dernier, le procureur George Gascon a confirmé que des documents corroborant les accusations des frères Menendez étaient désormais entre les mains des autorités. De plus, un témoignage crucial de Roy Rossello, ancien membre du boysband Menudo, pourrait bouleverser l’affaire. Dans un documentaire de 2022, Rossello affirme avoir été lui aussi victime des abus de José Menendez lorsqu’il travaillait chez RCA Records.
Une chose est sûre : la saga des frères Menendez est loin d’être terminée.