
Quatre ans après ce drame, le tribunal administratif de Lyon a condamné l’administration pénitentiaire pour faute, soulignant des manquements graves dans la gestion de sa détention.
Les faits : une mort dans un contexte de protestation
Le 22 juillet 2020, Alexis Di Grazia, un détenu originaire de Clermont-Ferrand et souffrant de schizophrénie, s’est intoxiqué au monoxyde de carbone après avoir mis le feu à son matelas. Ce geste, présenté comme une protestation contre ses conditions de détention, est survenu alors qu’il se trouvait au quartier disciplinaire du centre de détention.
Le jeune homme avait été condamné à une peine de 74 jours d’isolement disciplinaire, une sanction excédant largement la limite légale de 30 jours prévue par le Code de procédure pénale. Malgré son état de santé mentale jugé incompatible avec un tel isolement, aucune mesure adaptée n’a été mise en œuvre. Quelques jours avant le drame, son psychiatre avait pourtant préconisé son transfert vers le service médico-psychologique régional (SMPR), mais cette demande n’a pas été suivie d’effet.
Le jugement : une faute de l’administration pénitentiaire
Le mardi 7 janvier 2025, le tribunal administratif de Lyon a rendu son verdict, estimant que l’administration pénitentiaire avait commis une faute grave. Selon le tribunal, le placement prolongé d’Alexis Di Grazia en isolement, combiné à l’absence de surveillance renforcée malgré son état de santé mental, constituait une négligence incompatible avec ses besoins médicaux et psychologiques.
En conséquence, l’État a été condamné à verser 49 812,57 euros à la famille du défunt, en réparation des préjudices subis.
Des responsabilités partagées : des zones d’ombre demeurent
Cette décision représente une première victoire pour la famille Di Grazia, qui milite depuis plusieurs années pour obtenir des réponses. En août 2022, elle avait dénoncé dans la presse un délai d’intervention excessif des agents pénitentiaires, affirmant que ces derniers avaient mis une heure et demie pour intervenir après le déclenchement de l’incendie.
Toutefois, cette mise en cause est fermement contestée par les syndicats du personnel pénitentiaire. Selon Jean-Louis Picornell, représentant de l’Ufap Unsa au centre de détention de Roanne, les agents sont intervenus rapidement et ont risqué leur vie pour tenter de sauver le détenu. Il déplore que des poursuites puissent viser des agents ayant agi dans des conditions difficiles.
Un cas révélateur des lacunes dans la gestion des détenus souffrant de troubles psychiatriques
L’affaire met en lumière les défis récurrents auxquels sont confrontées les prisons françaises dans la gestion des détenus atteints de troubles mentaux. Les critiques se multiplient sur l’insuffisance des structures adaptées, comme les SMPR, et sur l’usage prolongé de l’isolement disciplinaire pour des détenus présentant des vulnérabilités psychiatriques.
Le décès d’Alexis Di Grazia illustre ces dysfonctionnements et relance le débat sur les conditions de détention en France. Si le volet administratif du dossier est désormais clos, une procédure pénale est toujours en cours pour déterminer d’éventuelles responsabilités individuelles dans ce drame.
En attendant, la famille Di Grazia espère que cette décision judiciaire permettra d’éviter que d’autres détenus ne subissent le même sort tragique.