Mardi 7 octobre, le tribunal correctionnel a condamné le directeur d’un restaurant à six mois de prison avec sursis pour agressions sexuelles sur une employée. Entre septembre 2023 et fin février 2024, cet homme a systématiquement imposé des contacts physiques non consentis à l’une de ses serveuses, malgré ses protestations répétées.
La juridiction a également ordonné son inscription au Fijais, le fichier judiciaire national des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes, marquant durablement son parcours judiciaire.
Un harcèlement quotidien derrière le bar
La victime a décrit un schéma répétitif insupportable. Régulièrement, lorsqu’elle se trouvait à son poste derrière le comptoir, son supérieur hiérarchique passait derrière elle en lui imposant des contacts sur les hanches et les fesses. Face aux remarques de l’employée, l’homme présentait des excuses formelles avant de recommencer invariablement.
Cette répétition des gestes, malgré les objections clairement exprimées, caractérise parfaitement le harcèlement sexuel et révèle un mépris total du consentement.
Une victime déjà fragilisée psychologiquement
Déjà traumatisée par une agression sexuelle subie durant son adolescence, la serveuse portait une vulnérabilité particulière qui aurait dû appeler d’autant plus à la prudence. Elle a d’abord tenté de résoudre la situation en interne, s’adressant au directeur adjoint de l’établissement.
Mais ce dernier, loin de protéger son employée, a choisi de défendre son supérieur hiérarchique, illustrant la culture d’omerta qui règne parfois dans certains établissements.
L’escalade hiérarchique qui sauve
Face à l’inaction locale, la victime a contacté un cadre de la chaîne de restaurants qui l’emploie. Celui-ci lui a conseillé de déposer plainte, reconnaissance implicite de la gravité des faits et de l’impossibilité de les traiter en interne.
Acculée, la jeune femme a finalement démissionné pour échapper à ces agressions quotidiennes, sacrifiant ainsi un métier qu’elle appréciait et une évolution de carrière prometteuse.
La défense bancale du « relationnel professionnel »
Lors de son audition, le mis en cause a nié catégoriquement les faits. Il a minimisé ses gestes en évoquant de simples contacts sur le dos ou l’épaule, présentant ses excuses comme la preuve de sa bonne foi : « Je le fais sur les employés masculins comme féminins, je ne voyais rien de mal. »
Le directeur adjoint a tenté de normaliser ces comportements en affirmant qu' »on peut être tactile dans la profession », argument fallacieux qui confond chaleur humaine et contacts sexualisés non consentis.
Des témoignages accablants
Deux collègues de la plaignante ont formellement confirmé les agressions décrites et l’angoisse palpable de leur consœur. L’une d’elles a révélé que la victime lui demandait régulièrement de venir l’attendre, même pendant ses jours de repos, « de peur de se retrouver seule à faire la fermeture avec lui ».
Ces témoignages concordants ont balayé la version édulcorée du prévenu et démontré la réalité du climat de terreur instauré.
Une fuite révélatrice en pleine audience
Présent initialement au tribunal, le directeur a quitté la salle avant même l’évocation des faits qui lui étaient reprochés. Cette désertion en dit long sur son incapacité à affronter ses responsabilités et à regarder en face les conséquences de ses actes.
Cette absence a été sévèrement déplorée par le procureur, qui avait requis six mois de prison ferme.
Une carrière professionnelle détruite
Me Hugues Roumeau, conseil de la victime, a souligné l’ampleur du préjudice subi. Contrainte d’abandonner la restauration, sa cliente s’est reconvertie dans l’aide à la personne avec une rémunération inférieure, « alors qu’elle appréciait son métier jusqu’à la survenance de ces faits ».
Ironie cruelle : elle avait été promue cheffe de salle par son agresseur lui-même, nomination qui l’avait d’ailleurs interpellée tant d’autres candidats semblaient plus légitimes. Cette promotion apparaît rétrospectivement comme un moyen supplémentaire de la maintenir sous son emprise.
Des dommages partiellement reconnus
L’avocat réclamait 3 000 euros de préjudice moral et 11 391 euros de perte de salaire. Le tribunal n’a accordé que 1 500 euros de dommages et intérêts, rejetant le reste des demandes. Une somme dérisoire au regard du traumatisme subi et du sacrifice professionnel consenti.
Le directeur conserve par ailleurs son poste, illustrant l’impunité pratique dont bénéficient parfois les auteurs d’agressions sexuelles dans le monde professionnel, malgré une condamnation judiciaire.

